Sache et observe que les plus avisés des savants chrétiens ....




Hervé-élie Bokobza
Je publie ce texte édifiant de R. Yakov Emden appelé le Yabets (1698-1776), une des plus grandes autorités du judaïsme ashkénaze. Ce texte est sans conteste l'un des plus ouvert que j'ai pu lire dans la littérature rabbinique vis-à-vis des Chrétiens. Ceci est d'autant plus extraordinaire sachant que son auteur était réputé pour être le plus grand combattant du Shabtaïsme. C'est un peu long mais ça mérite d'être connu, (la traduction a été faite par votre serviteur):

"Sache et observe que les plus avisés des savants chrétiens ne se contentent pas d’approfondir leur recherche dans la Torah écrite, de faire connaître sa valeur et de l’ériger comme étendard dans le monde, mais soutiennent aussi la Torah orale, la protège, à l’abri de toutes agressions. C’est ainsi que lorsque des membres mal intentionnés, fautifs de notre peuple, voulaient s’en prendre au Talmud, le détruire et l’anéantir du monde, des défenseurs [parmi les chrétiens] se sont engagés pour le sauver.
Comme l’écrit [R. ‘Haïm b. Betsalel (1530-1588)], le frère du Maharal de Prague, qui, dans le deuxième chapitre de son livre Sefer Ha’haïm témoigne : « J’ai entendu dire par des anciens du pays que dans les temps passés des impies de notre peuple se sont insurgés contre le Talmud, avec pour intention de le brûler. Ceci du fait de certains passages qui prêtent [pour le non initiés] le flan à la raillerie. Et voilà qu’ils sont presque parvenus à concrétiser leur odieuse besogne. Jusqu’à ce que Dieu éveille l’esprit d’un chrétien qui s’est tenu devant les princes et les gouverneurs des peuples et qui a pris la défense de ce livre Saint. Il leur expliqua que les étranges historiettes qu’on peut lire dans le Talmud sont comparables aux herbes et poisons mortels ou autres encens semblables que l’on trouve dans les drogueries et qui pourtant peuvent-être dans certains cas d’une grande utilité pour la santé. Ainsi que l’écrit le Roi Salomon. Sauf que ce genre de médicaments ne peuvent être vendus qu’à des médecins réputés, qui seuls sont capables de discerner dans quel cas ils sont bon pour l’homme, et dans quelles conditions les utiliser pour éviter tout danger. Il en est de même des aphorismes des sages et leurs mots d’esprits, qui ne peuvent être compris que par des initiés. Mais qui sont des poisons de morts pour les idiots qui avancent dans les ténèbres. Les paroles de ce chrétien ont convaincu les rois et les gouverneurs, au point que les délateurs soient sorties désemparés. »
C’est comme ça que parmi les chrétiens beaucoup de savants ont fait l’éloge de la profondeur de la sagesse de nos sages dans la aggada, en affirmant que leur procédé, de parler par énigmes, emploie la méthode des anciens. Ces mêmes savants se sont aussi mépris de ces juifs en leurs temps qui se permettaient de tourner en dérision les paroles de leurs Maîtres. Malheur à une telle honte et un tel affront. Combien de sages chrétiens ont été de vrais défenseurs d’Israël, de leur foi et de l’enseignement de leur Torah. Dont figure en particulier des papes de Rome tels que Grégoire, et son disciple Augustin, ainsi que Sixte, Justin, Reuchlin, Bernard, et beaucoup d’autres semblables, qui ont sauvés Israël du piège dont ils ont été jeté par les ennemis d’Israël et sont parvenus à faire annuler plusieurs pogromes contre le peuple juif.
Soir en plus attentif à l’œuvre de Dieu qu’il a agit pour nous dans notre exil. Si ce n’était en effet l’entremise de ces nombreux et grand princes, parmi les Chrétiens, la Torah aurait presque fini par être oubliée. Ce sont eux qui se sont mobilisés et qui ont investis de leurs propres biens, pour publier les œuvres saints que nous possédons ; Bibles, Mishna, Talmud, les œuvres midrashiques, incluant les plus grands classiques des ouvrages des commentateurs. C’est par leur intermédiaire que nous devons leurs publications, qu’ils ont publiés dans des collections de qualités. Sans leurs soutiens personne n’aurait eu les moyens de publier un millième de ce qu’ils ont faits. Il va sans dire que nous leur sommes redevables et leur devons reconnaissances, tout comme nous sommes reconnaissant à Dieu que « c’est pour nous apporter subsistance que Dieu les a envoyé devant nous » . 

R. Jacob Amden (1698-1776) – (Est Avot sur les Chapitres des Pères 4, 11)